Test Wanderstop : Qui dit grandes attentes, dit...

Published in Tests
April 12, 2025
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The Stanley Parable fait partie de ces jeux qui ont changé ma vision du jeu vidéo. Ça faisait déjà bien longtemps que je ne le considérais plus uniquement comme du simple divertissement, mais Stanley Parable m’a permis de voir que le médium réfléchissait à ses propres limites, mûrissait, et apportait des réflexions qu’il était le seul à pouvoir susciter. Puis The Beginner’s Guide, dans toute sa complexité et sa bizarrerie, m’a aussi montré un aspect plus personnel, plus humain du jeu vidéo. Pas d’objectif, ni de compétition, ni d’ennemis à abattre. Simplement des niveaux non terminés, un jeu qui raconte une histoire en puisant dans la nature même du jeu vidéo et fait réfléchir d’une manière bien plus profonde que des projets avec des millions d’euros de budget et des centaines de développeurs. Autant dire que mes attentes pour Wanderstop étaient hautes.

Des rencontres atypiques

Sauf que Davey Wreden, le créateur génial derrière les jeux cités précédemment, a pris une direction plutôt inattendue : Wanderstop est un cosy game. Un genre dont je maîtrise peu ou prou les codes, car il faut dire ce qui est : il ne m’intéresse pas des masses. Je joue rarement aux jeux vidéo pour me détendre. Plutôt pour réfléchir, vivre une aventure, découvrir de nouvelles perspectives, me plonger dans un monde riche ou me confronter à des défis presque insurmontables. Les raisons ne me manquent pas, mais celle de la détente ne figure que très bas dans la liste des priorités. Mais bon, on s’en doute, on ne peut avoir créé The Stanley Parable et s’arrêter à une ambiance chaleureuse. Non, Wanderstop parle de burn-out et de dépression.

On incarne Alta, une combattante déchue prête à tout pour devenir la meilleure. Après une défaite cuisante, elle part dans une forêt à la recherche d’une professeure pouvant lui enseigner à redevenir la meilleure. Sauf que ses forces la quittent et elle s’évanouit. Elle se réveille aux côtés de Boro, au chara-design aussi cosy que son salon de thé et les alentours. Il lui propose de rester quelque temps, histoire de se ressourcer, et au passage l’aider à faire du thé pour les gens de passage. L’occasion de rencontrer une jolie palette de personnages, tous plus attachants les uns que les autres.

Un papa chevalier prêt à tout pour faire la fierté de son fils, une vendeuse itinérante capitaliste, un être tout droit sorti du cosmos, des cols blancs prêts à dégainer leurs présentations powerpoint soporifiques, une gamine abandonnée, et ainsi de suite ; les profils sont aussi variés qu’inattendus. On s’attache à cette ribambelle de personnages, que l’on découvre via des dialogues souvent drôles, parfois touchants. Le jeu est découpé en forme de saisons – pas vraiment, mais on peut facilement y associer les changements qui surviennent – et chaque passage du temps sera l’occasion de découvrir les nouveaux arrivants. De ce côté-là, Wanderstop réussit très bien à nous emporter avec lui, grâce au chara-design vraiment sympathique de chaque nouvelle tête qui se présente.

Screenshot Wanderstop

Vous reprendrez bien un peu de thé ?

Mais qu’est-ce qu’on fait dans Wanderstop ? Ben, du thé. Mais ce n’est pas si simple ! Il faut récupérer des graines, les planter dans une position précise puis les arroser. À partir de là, une plante pousse, on récupère ses fruits et on peut ainsi commencer à utiliser cette « théière. » On met de l’eau, qu’on fait bouillir, on ajoute les fruits et les boules de thé qu’on aura récupéré grâce aux feuilles qu’on aura préalablement été cherché aux alentours du salon, et… Tada ! Évidemment, tout l’intérêt se situe dans le fait que chaque fruit possède un effet bien à lui. L’un rend mélancolique, l’autre donne envie de dire le mot triangle, un autre, encore, a le goût des céréales qu’on mangeait étant enfant. Et il faudra bien sûr deviner le fruit correspondant lorsque les clients exigent des thés avec des demandes quand même bien farfelues, du genre boire un thé au livre.

Screenshot Wanderstop

Et puis ce n’est pas tout ! On peut aussi prendre soin du salon de thé en balayant les saletés, il faut évidemment laver les tasses, on peut s’occuper de la déco, couper les ronces qui finissent sinon par tout envahir, aller caresser un de ces pingouins aux sourcils beaucoup trop prononcés, cueillir des champignons qui auront des effets bien particulier sur la recette de thé, et ainsi de suite. On a toujours de quoi s’occuper dans Wanderstop, et c’est toujours l’occasion de profiter de la sublime direction artistique qui est vraiment chaleureuse. On s’y sent bien, dans ce petit coin perdu, même lorsqu’on décide de simplement se poser sur un banc pour boire un thé.

Pas si cosy que ça ?

Parce que oui, c’est aussi tout à fait possible de ne rien faire. C’est même tout le propos du jeu : on n’est obligé à rien, on peut aussi se détendre. Wanderstop est un jeu qui parle de la surcharge qu’on peut s’infliger soi-même à cause d’attentes disproportionnées. Il parle du dégoût de soi, du changement, de l’incapacité à écouter son propre corps. Il parle de beaucoup de choses via les personnages que l’on rencontre, mais principalement via Alta et ses réflexions sur sa condition de combattante déchue.

Screenshot Wanderstop

Et c’est sans doute là le principal problème que j’ai avec le jeu : son message n’a pas résonné en moi. J’ai apprécié l’expérience, j’ai pris plaisir à me détendre avec Boro et les nouveaux arrivants. J’ai adoré les musiques, l’ambiance, et surtout cette bulle de tranquillité. Le jeu ne nous force jamais à rien : il n’y a pas de temps imparti, pas d’échec définitif, pas non plus d’accumulation de ressources puisque tout disparaît à chaque saison, bref, il questionne réellement certains rapports nocifs qu’on peut avoir avec le jeu vidéo qui cherche constamment à nous faire devenir meilleur, quitte parfois à s’arracher les cheveux durant des heures devant un boss. Et surtout, c’est un jeu qui transpire la sincérité ! On sent le vécu des développeurs et ça ne rend leur message que plus puissant. Parce que oui, j’ai uniquement évoqué Davey Wreden, mais il y a aussi Karla Zimonja qui a notamment bossé sur Gone Home et Bioshock 2 et l’excellent C418, à qui l’on doit les musiques de Minecraft. Une bien belle équipe, qui délivre un jeu qui me semble être très personnel.

Mais voilà, le message ne m’a pas touché. Peut-être le manque de subtilité et les gros sabots en sont la raison. Peut-être que mes attentes étaient disproportionnées vu le CV des développeurs, ou peut-être est-ce encore une fois mon manque d’intérêt pour les cosy game. Ou peut-être parce que je n’ai jamais vécu quelque chose d’aussi violent qu’Alta. Je ne saurais dire si c’est précisément une de ces raisons ou toutes à la fois, mais j’ai l’impression d’être passé à côté du jeu. J’ai apprécié ce qu’il disait bien sûr, car ça correspond à mes valeurs et à ma vision du monde. Le jeu critique cette volonté de productivité à tout prix, même d’éléments aussi fondamentaux comme la détente ou l’ennui. Il envoie quelques tacles bien placé au capitalisme néolibéral en passant, et c’est toujours bon à prendre. Mais le cœur du sujet, lui, j’y suis resté hermétique. Et ce n’est pas grave, mais ça amenuise forcément l’impact d’un jeu comme Wanderstop. Attention toutefois, c’est quelque chose de personnel, et nul doute qu’il saura toucher d’autres personnes, dont peut-être vous !

Screenshot Wanderstop

Points positifs


L’ambiance
Les visuels
Faire du thé, c’est satisfaisant
Les dialogues

Points négatifs


Assez…creux ?
Peut-être un poil répétitif
L’impression d’être passé à côté de quelque chose

6
Sympa sans plus
Wanderstop me laisse un petit goût amer, comme s’il manquait le déclic qui avait si bien marché avec The Stanley Parable et Beginner’s Guide. C’est un bon cosy game : on se détend en préparant du thé, on profite de dialogues bien écrits et d’un doublage plutôt qualitatif. L’ambiance est chaleureuse, et le message est important dans une époque où on court après le temps sans jamais prendre le temps de se poser. Mais pourtant, il m’a semblé inoffensif, presque oubliable. Une bulle de détente, qui, comme un rêve, disparaît au réveil suivant. Peut-être en attendais-je trop. Si Wanderstop est un bon jeu, ce n’est ni une révolution ni un jeu qui m’a fait réfléchir. Mais au moins, il m’a rappelé que le jeu vidéo n’a pas besoin d’en faire des caisses ni d’avoir des exigences envers les joueurs, et c’est déjà bien.
DonBear

DonBear

Fondateur

DÉVELOPPEUR :

Ivy Road

ÉDITEUR :

Annapurna Interactive

DATE DE SORTIE :

11 mars 2025

PLATEFORME :

PS5 et PC

PRIX À LA SORTIE :

22,99 €

Testé sur PS5
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